Parc Jean Drapeau dimanche 9 juillet 2006, avant la défaite, quand on y croyait encore...
Le mondial est fini, on peut reprendre une vie normale, avant que le 14 juillet n'arrive ! Je suis moins sûre que les drapeaux s'agitent pour l'occasion, même si, quand on est à l'étranger, on est plus prompt à sortir les symboles...
Dimanche, la finale avec Nadine et Bernard, les cousins, et 3 copines québécoises qu'on a essayé de convertir à la joie ambiante. Arrivée Parc Jean Drapeau, munis de drapeaux tricolores, trouvés près de chez moi, dans la petite italie ! Dès la station Berry Uqam, la foule se densifie, et en écho : "Allez les bleus", "Zidane y va marquer", "Ohé, ohé ohé"...
Sur le site, soleil de plomb, une petite foule tricolore... et quand même quelques drapeaux italiens. On a des passes pour la tente "vip", mais on décide de la snober les premières heures, croyant que l'ambiance dehors serait meilleure que dedans...
En majorité absolue, les partisans des bleus dont on fait bien sûr partie. Plus de place nulle part, le match va commencer et on est bien serré devant l'écran géant. Silence, entrée des joueurs dans l'arène... Cris, on voit Zidane à l'écran. Tout le monde debout pour l'hymne français, même les québécoises, qui font semblant de scander "Zizou, Zizou !" Les drapeaux s'agitent. Le site devient de plus en plus compact. Plus personne ne peut rentrer. Ernesto, l'un des organisateurs de la Lucarne angoisse à la mi-temps. Il est passionné de foot, mais craint les débordements sur le site, et n'a presque rien vu du match. Il s'agace contre la Ville, les autorités, qui décidément connaissent bien mal leurs propres citoyens et qui n'ont pas cru au succès de la rediff. "On aurait pu remplir le stade olympique..." Reprise du jeu, mais il est toujours dehors, à l'affut, espérant que la fête ne tourne pas au saccage. Je rentre dans la tente. Quelques émotions, les prolongations, et la loterie... C'est fini, Zidane sort et la France perd. Les partisans français ont les larmes aux yeux. Sanna, Ernesto, Fredérique... On se dit au revoir avec amertume. L'aventure est finie. Bernard continue quand même à chanter, Maryse et Isabelle s'amuse des émotions intenses dont elles sont témoins seulement. Direction le métro, pas de bousculade, pas trop de joie non plus... On ne crie plus, on rentre tranquillement, et on imagine juste ce que ça aurait pu être. Pendant ce temps, La petite Italie exulte.
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A lire :
Des femmes voilées et des hommes à béret
Ronald King
La Presse
L'événement a failli mal tourner. Les gens de la Ville de Montréal avaient ordonné aux agents de sécurité de ne laisser entrer personne après le 12000e spectateur au parc Jean-Drapeau, où le groupe La Lucarne présentait le match sur écran géant. Douze mille personnes, donc. Et les autres, qui attendaient sagement en file sous un soleil cruel, qui ont attendu près d'une heure, ont été informés qu'ils devaient retourner chez eux.
Certains ne l'ont pas digéré et une bousculade a suivi, des clôtures ont volé, des gens sont tombés au sol... Pendant quelques minutes, on a eu peur.
Solution: laisser passer les plus violents et repousser les autres. Il paraît que c'est la façon de procéder, et elle a très bien fonctionné. Le calme est vite revenu, les violents sont entrés et les autres, les dociles, sont retournés chez eux.
Un peu comme ça se passe souvent dans la vie, n'est-ce pas?
Selon les représentants de la Ville, entre 2000 et 3000 personnes auraient été refusées à l'entrée.
Pendant ce temps, dans une scène qui n'était pas sans rappeler la frontière entre le Mexique et le Texas, d'autres amateurs de foot arrivaient à la nage par les canaux, des eaux d'une couleur douteuse où, normalement, on n'aurait pas idée de mettre un orteil.
Selon un des chefs de la sécurité, de petits débrouillards auraient même loué des chaloupes un peu plus haut dans l'île et ils auraient amené des passagers sur le site moyennant un petit pécule...
Bref, la fièvre de la Coupe du monde avait atteint les îles de Montréal hier. On a vu des femmes voilées et des hommes qui portaient des bérets français malgré la chaleur. La majeure partie de la foule se rangeait d'ailleurs du côté de la France et de Zinédine Zidane. Certains ont été victimes de coups de chaleur et ont perdu connaissance. Mais, à part l'accrochage à l'entrée, la journée s'est déroulée dans une joyeuse camaraderie, même avec les partisans italiens.
Et quand Zizou a marqué, tôt dans le match, on a su qu'il y aurait un match et qu'on n'aurait pas à s'ennuyer avec un 0-0 typiquement italien.
Le promoteur Mustapha Terki et son équipe de La Lucarne ont été (agréablement) surpris par la réponse du public. À un moment donné, ils ont regretté de ne pas avoir loué le Stade olympique...
Leur but était de rassembler toutes les communautés ethniques de la ville en un endroit plutôt que de voir chacune demeurer dans son quartier et dans le bistro de ses habitudes. Ce n'est pas évident.
Mais comme ils projettent de répéter l'expérience dans deux ans pour la finale de l'Euro, ils ont le temps de vendre leur idée. Chose certaine, il devront trouver un espace plus grand. On parlait hier du parc Maisonneuve.